Un doigt voulait se poser, juste comme il faut, sur le bon temps, entraîner les autres, eux aussi, bien en mesure, mais voilà qu’il reste en suspens et me dit :
Tu veux être trop nombreux sur le piano, monsieur Temps, monsieur Nuit, le cheval et toi !
Je soupire.
Ah… (Je vois l’image d’un colporteur avec un échafaudage de meubles et de pantins sur son dos, qui tenterait de prendre appui sur lui, le doigt, cette image m’amuse et fait fuir mon doute)
Je crois qu’il va falloir t’y faire. Oui, ce n’est pas gagné, mais je ne peux pas me séparer d’eux, ils me collent à la peau maintenant, ils m’emplissent, je serais vide sans eux, une peau vide sans rien dedans, comment voudrais-tu que je joue, que je bouge seulement !
Le doigt semble consterné.
Nous sommes, nous les doigts, sensibles au moindre courant d’air, le moindre souffle de pensée nous arrête, nous détourne de notre élan.
Ça va peut-être s’arranger. Je suis content que vous m’adressiez la parole, je suis flatté. Je me sens presque comme La Fontaine.


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