Je pose le papier et le crayon sur le piano et je retrouve ma maladresse intacte. Aucune petite souris ne sort de la mine de crayon. Je devine sa méfiance ou sa timidité. Peut-être fallait-il que je la dessine. Je sens que je nous complique la vie. Raconter des histoires est bon pour les enfants. Les souris et les hommes… c’est beaucoup plus sérieux. Je ne suis pas convaincu mais je me remets seul à ma tâche.
Tandis que mes doigts trottinent je vois qu’elle n’est pas venue pour rien. Il y a une petite rondeur dans mon cerveau, et jusqu’un petit fluide au bout des doigts. Le papier et le crayon se sont curieusement endormis, évanouis. Je voudrais bien comprendre comment elle saute de l’un à l’autre, comme par dessus un gouffre. Tout à fait comme je fais lorsque je bondis du piano jusqu’à la table pour écrire.

Trois profs, mes ex-collègues, passent par là. Je leur offre un verre de vin. Je ne comprends pas tout de suite qu’ils sont envoyés par le principal. Ils sont là pour me sonder. Mais je bois verre sur verre et je commence à délirer. Je démissionne — bien sûr que c’est vrai — c’est la quatrième fois que je démissionne dans ma vie. Que je fuis mes responsabilités. Ils s’en vont finalement et je prends le chemin de la rivière. Je me roule dans les pierres et là je vois la petite souris : un dos noir parmi les galets blancs. Elle ne se sauve pas. Je la reconnais. A ses moustaches, à ses tout petits yeux. Elle est de mon écriture. Proche du sol, comme le crayon gratte le papier. J’entends même sa musique. Je reste près d’elle. Elle sait des choses que je ne sais pas savoir.

Une réflexion sur “

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