amour

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Tu m’as parlé.
Je sais que de toi mieux vaut ne rien dire — personne ne sait rien, personne ne peut oser, ne peut prétendre à une vérité sur toi, à une mainmise sur ton épaule, Amour. Mais puisque tu m’as parlé, je dois l’avouer, j’avoue : tu m’as fait mal, tu as empaumé mon ventre, tu t’es pressé comme une argile, comme un fruit pour t’expulser sournoisement de mes entrailles relâchées après cette nuit claire, après ces jours de travail, après ce tricotage du château de mes rêves.
Tu n’en voulais pas.
Tu n’es qu’un mot fait d’air et de chansons, un mot d’espace qui gonfle et s’envole au-dessus des arbres, des chemins et des mers où les vents te portent. Toi, l’allié du soleil, des danses et des sourires, libre de moi, de sortir et d’entrer où bon te semble, tu m’as parlé, il t’a suffi de t’extirper de mon ventre, doux vocable, pour que je voie ta rondeur et tes bondissements, tes glissades, tes petites cachoteries dans les coins d’ombre.

Kandinsky, Bleu de ciel, 1940, Huile sur toile (100 cm x 73 cm), détail.